La situation de famille des salariés figure parmi les critères qui ne doivent pas influencer les employeurs pour procéder à un recrutement, prononcer une sanction disciplinaire, fixer la rémunération d’un salarié ou bien encore modifier ses horaires de travail. En effet, les décisions prises par l’employeur, en raison de la situation familiale d’un salarié, peuvent être considérées comme discriminatoires. C’est notamment le cas lorsque l’employeur refuse que deux salariés en couple travaillent en même temps…
Récemment, deux salariés en couple avaient été successivement recrutés, en tant « qu’hôtes service client », dans le même service d’une entreprise. Après avoir eu connaissance de leur relation intime, l’employeur avait modifié leurs plannings afin qu’ils ne travaillent jamais en même temps. Selon lui, le fait que ces salariés travaillent ensemble aurait été « hors procédure », un usage interne consistant à ne pas faire travailler en même temps, au sein du service client, les salariés en couple ou ayant un lien de parenté. Et ce, afin de préserver les bonnes relations dans chaque service et de prévenir tout conflit d’intérêt. Plus tard, l’un des salariés avait abandonné son poste de travail (ses demandes de mutation et de rupture conventionnelle ayant été refusées) tandis que l’autre n’avait pas vu son contrat de travail à durée déterminée renouvelé. Ces derniers avaient alors saisi la Défenseure des droits, estimant avoir été victime d’une discrimination en raison de leur situation familiale.
Saisie du dossier, la Défenseure des droits a relevé que la situation de famille des salariés était à l’origine des mesures prises par l’entreprise s’agissant de leurs horaires de travail, ce que l’employeur n’avait d’ailleurs pas contesté. Et que ces mesures avaient donc un caractère discriminatoire. Les raisons invoquées par l’employeur, à savoir l’absence de « contre-pouvoir » lorsque deux salariés en couple travaillent ensemble et la sensibilité du service auquel ils étaient rattachés (encaissements, reprise de marchandises…), alors même qu’il n’existait aucun lien de subordination entre ces employés, n’ont pas convaincu la Défenseure des droits. Selon elle, ces raisons ne justifiaient pas les restrictions apportées aux droits et libertés des salariés, y compris de manière préventive. Pas plus qu’elles ne constituaient des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
Aussi, l’employeur s’est vu recommandé, notamment, de se rapprocher des salariés afin de procéder à une juste réparation du préjudice qu’ils ont subi et de modifier ses pratiques afin de respecter le principe de non-discrimination.
Défenseure des droits, décision du 23 juin 2023, n° 2023-0001, JO du 12 septembre
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